Chaque individu possède en lui la ressource de développer des histoires qui le rendront plus fort

Accompagnement des hommes et des femmes dans leur vie au travail :

  • Accompagnement individuel
  • Accompagnement d’équipes et de communautés

Accompagnement des jeunes dans leur parcours scolaire :

  • Orientation - Aller à la recherche de son projet
  • Confiance en soi - Gestion du stress

Perles de vie Publié le : 1 mai 2015

porte cleVers qui ou vers quoi revenir quand on a besoin de force

Quand le praticien narratif accompagne une personne et qu’une histoire préférée émerge, c’est-à-dire une histoire qui fait écho à ce que cette personne veut pour sa vie, il va s’efforcer de faire en sorte par tous les moyens que cette personne reste le plus possible reliée à cette histoire. Car rester connecté à l’histoire préférée peut s’avérer pour elle un redoutable défi au milieu des autres histoires qui lui font encore concurrence.
Une manière puissante d’y arriver consiste à trouver des témoins de ces histoires préférées ou bien des personnes qui ne seraient pas étonnées de ce qu’elles racontent ou encore qui apprécieraient ce qu’elles disent. En quelque sorte des témoins de l’histoire préférée.

Une fois ces témoins identifiés, il s’agit d’engager une conversation de re-membering (L’expression « re-membering » est un jeu de mot créé par Barbara Myeroff entre re-member : redevenir membre, et remember : se souvenir) afin que ces personnes ne soient pas seulement un nom, mais qu’elles s’incarnent un maximum. Celui ou celle que nous accompagnons se rend alors compte de l’importance de ces personnes dans sa vie mais également de l’importance qu’elle a dans la vie de ces personnes. En pratique narrative, on appelle l’ensemble de ces témoins de l’histoire préférée le « Club de vie ». C’est en quelque sorte son club de soutien. Lire la suite de cet article »

Publié le : 1 mai 2015 | Aucun Commentaire | Partager/Mettre en favoris


Dire « bonjour à nouveau » Une nouvelle approche du deuil Publié le : 8 novembre 2014

Michael White

Et si, plutôt que de chercher à oublier nos disparus, nous leur disions « bonjour à nouveau » ? C’est l’invitation de Michael White, convoquant le souvenir.

Ci-dessous un très bel article publié dans le magazine La Vie du 23 octobre qui s’intéresse et rend hommage au travail entre autre de Michael White sur le concept de « Dire bonjour à nouveau ». Merci à Etienne Séguier, Journaliste à la Vie de m’avoir autorisée à publier son article.

Oublier et tourner la page plutôt que de ressasser des souvenirs … le travail de deuil prend du temps. Parfois même, certains n’arrivent pas à aller de l’avant, tourner la page. Et si plutôt que de chercher à ne plus penser à eux nous essayions de leur « dire bonjour à nouveau » ? C’est l’étonnante proposition formulée par le thérapeute australien Michael White qui utilise le souvenir comme outil thérapeutique.

Mary avait 43 ans lorsqu’elle a consulté Michael White, un thérapeute australien pour la première fois. Six ans auparavant, elle avait perdu son mari décédé d’une crise cardiaque. Jusqu’alors, ils avaient entretenu une belle complicité aimante. Après ce drame, elle avait sollicité des psychologues pour l’aider à accepter cette mort, mais sans y parvenir. Au cours de l’entretien, elle a expliqué qu’elle pensait être incapable de « dire au revoir » à son mari. Michael White l’a alors surprise avec cette hypothèse surprenante : n’aurait-elle pas au contraire trop bien exprimé un « au revoir ». Après un moment de silence, Mary s’est dite intéressée par cette approche. Michael White lui a alors proposé de faire l’expérience de « dire bonjour à nouveau » à son conjoint disparu, en renouant avec leurs souvenirs communs.
C’est à cette occasion que cette démarche a été expérimentée pour la première fois par le thérapeute. Mary a commencé à sangloter doucement. Puis elle a répondu qu’il était « enterré trop profond » dans sa mémoire mais que cela pourrait l’aider de le « déterrer un peu ». Michael White lui a posé plusieurs questions pour « redire bonjour » à son mari et se relier aux regards positifs qu’il nourrissait à son égard. (voir question plus bas). Selon cette approche, il ne s’agit pas de se remémorer les qualités du défunts, mais de percevoir comment ce qui dans notre relation avec lui nous a construit. Durant les deux entretiens suivants, Mary a partagé des redécouvertes qu’elle faisait sur elle-même et sur la vie. Lors du suivi, douze mois plus tard, Mary a confié : « C’est étrange, mais quand j’ai découvert que je n’étais pas obligée de me séparer de mon mari, il a moins envahi mes pensées, et ma vie est devenue plus riche ».

Présenté en 1988 en Australie, cette façon d’accompagner les personnes en deuil est désormais pratiquée aux États-Unis, et plus récemment en Europe, par les psychologues et les coachs, formés à ce que l’on appelle « la pratique narrative ». Cette technique identifie les histoires de notre vie en distinguant celles qui pèsent sur nous et celles qui nous dynamisent. « Se dire bonjour » à nouveau s’adresse en priorité à des patients diagnostiqués comme souffrant d’un « deuil pathologique ». Toute leur existence est organisée autour du proche disparu. Souvent, ces personnes cherchent réellement à effectuer le travail de deuil. « Mais du coup, elles appuient là où cela fait mal, ce manque de la présence physique des personnes, explique Dina Scherrer, coach et formatrice en pratique narrative. À l’inverse, en disant « bonjour à nouveau » à une personne disparue, le proche vivant se donne la permission de commencer une autre forme de relation avec le défunt. » Curieusement, cette démarche permet à l’être décédé de ne plus occuper toute la place, sans pour autant disparaître de l’existence de la personne encore vivante. « Se regarder par les yeux de celui qui est parti permet de reconstruire une identité blessée par le décès. Notre identité se tisse à travers la relation aux autres, précise Dina Scherrer. Lorsqu’on perd un proche, c’est comme si une partie de notre identité partait avec lui. La mort fige cette histoire et elle ne peut continuer à évoluer que si l’on conserve une forme de relation avec la personne qui est partie. »

Béatrice Cameron, psychologue et coach s’est formée à la pratique narrative. C’est elle qui a traduit en français l’article dans laquelle Michael White présente cette façon de « dire bonjour à nouveau » (disponible sur le site : http://www.croisements-narratifs.fr/). « En cas de deuil, nous vivons deux types de perte, explique-t-elle. La première, irréversible, est celle de l’être physique. Mon parent, mon conjoint n’est plus là et je ne pourrais plus goûter à sa présence. La seconde, symbolique, désigne tout ce qui a été partagé avec cette personne. Le travail de deuil classique préconise de « tourner la page » en vivant non seulement la perte physique, mais aussi symbolique, en cherchant à ne plus penser à la personne. » L’approche de Michael White invite au contraire à traiter comme un héritage de plus les éléments heureux vécus ensemble en les réintégrant à notre existence. En anglais, se « dire bonjour à nouveau », s’exprime par le terme « remembering » avec le double sens de « se souvenir » mais aussi « refaire membre » (se réapproprier).

Alors oublier ou se souvenir, quelle solution privilégier ? Les praticiens de cette approche sont d’accord pour ne pas l’opposer avec le « travail de deuil » classique. Ce travail se décompose en cinq étapes qui ne sont pas forcément linéaire, ni systématique : le déni de la mort, la colère, le marchandage en faisant comme si la personne pouvait revivre, la dépression et enfin l’acceptation de la disparition. « Se dire bonjour à nouveau » ne prétend pas se substituer à ces réactions bien humaines. Il propose plutôt un accompagnement lorsque les vivants demeurent pris par la dépression, sans que l’acceptation arrive. « C’est comme si la personne était partie avec une valise, emportant la manière qu’elle avait de nous regarder au moment où cela allait bien. Et avec elle les compétences qu’elles nous reconnaissaient. Comme si nos qualités avaient disparu avec la personne », conclut Dina Scherer. Nous pouvons rouvrir de temps en temps la valise pour ré-endosser ces compétences et continuer d’avancer avec elle.

Comment Bernard a renoué avec sa mère
Bernard avait trente cinq ans quand il a consulté un coach pour des problèmes de confiance en soi. Il avait eu une enfance heureuse jusqu’à la mort de sa mère, à l’âge de onze ans. Après avoir travaillé à muscler l’estime de soi, sans évolution notable, son accompagnateur lui a demandé un jour ce qui aurait changé dans sa façon de se voir lui-même si sa mère n’était pas morte. Après un long silence, les larmes sont montées, mais il a tout de même voulu poursuivre l’entretien. Le coach lui a alors proposé de travailler autour de la question suivante : « sa mère disparue ne lui manquerait-elle pas depuis trop longtemps ? » Il parut à la fois surpris et intéressé. « Qu’est ce que votre mère voyait en vous quand elle vous regardait à travers son regard aimant ? » « Comment est-ce qu’elle savait ces choses-là à votre sujet ? Qu’est ce que vous pouvez voir maintenant en vous qui a été perdu pour vous pendant de nombreuses années ? ». Petit à petit, Bernard se remémora des bons souvenirs, retrouvant des regards et des propos bienveillants tenus par sa mère. Cette façon qu’elle avait d’apprécier son air malicieux, son inventivité pour résoudre des problèmes du quotidien, sa capacité à courir vite. Il a osé partager sur ces découvertes avec son épouse et un de ses collègues. Il a moins cherché l’approbation de son entourage et à s’évertuer à être un autre. Sa mère disparue trop tôt a repris une juste place. Et lorsqu’il en a besoin, il se remémore à nouveau ses bons moments qui l’ont aidés à grandir jusqu’à ses onze ans et qui le soutienne encore lui-même devenu père de famille à son tour.

Les questions pour redire bonjour à nouveau
Dans l’article présentant son approche, Michael White a présenté les questions qu’il avait posé à Mary. Voici la trame de ces questions qui aident à renouer avec ses proches disparus. Nous les avons librement adaptées afin de les rendre plus claires pour un public francophone. Au delà du nouveau regard qu’elle permette d’acquérir sur soi, il est bon de prendre aussi le temps d’accueillir l’émotion qui se présente. Ce questionnaire peut favoriser un travail personnel, mais il ne saurait remplacer un accompagnement dans les cas de deuil particulièrement douloureux à vivre.
– Si vous vous voyez à travers les yeux de votre proche disparu, qu’est-ce que vous remarquez en vous que vous pourriez apprécier ?
– Qu’est ce que vous découvrez de vous-même quand vous prenez conscience de ce que ce proche appréciait en vous ?
– En quoi avez vous contribué à embellir son existence ?
– Qu’est ce que cela change si vous pouvez maintenant aimer ces qualités présentes en vous ?
– Habité par ces qualités, quel pas pourriez vous accomplir pour revenir à la vie ?
– Comment cette prise de conscience vous rend davantage capable d’intervenir dans votre propre quotidien ?
– En accomplissant ce nouveau pas, que pourriez-vous découvrir de nouveau sur vous-même ?

Accompagnement d’une classe endeuillée
Dina Scherrer, coach, a accompagné une classe de 3e Segpa (Section d’enseignement général et professionnel adapté) pour effectuer un travail sur l’estime de soi. Or, juste au moment de la rentrée, l’un d’entre eux, Foued, a été renversé par une voiture, en présence de deux camarades. Une Cellule psychologique a été mise en place pour faire face à ce deuil, mais les jeunes n’y sont pas allés. Avant de débuter l’accompagnement, Dina a rencontré chaque collègien en entretien individuel, mais ils n’ont pas parlé de Foued, là non plus. Durant les trois premiers rendez-vous, dans le cadre du travail sur l’estime de soi, silence encore, même si le nom de Foued était écrit sur tous les cahiers. Au cours de la quatrième rencontre, lors d’une simulation d’un rendez-vous pour obtenir un stage, une jeune fille s’est mise à pleurer en expliquant que leur ami aurait aimé effectuer cet exercice. « D’une certaine manière, j’ai l’impression qu’il y a un absent présent dans cette classe », s’est interrogé Dina et elle a proposé de consacrer la séance suivante à leur camarade, en présence des professeurs. La coach a invité chacun à partager les images qu’il gardait de lui. Puis elle a demandé ce qu’il a apporté à chacun dans leur vie, ce qu’il leur a appris et qu’ils allaient conserver. « Ce fut une séance extraordinaire où ils ont réintégré Foued dans leur vie et ils ont engagé une nouvelle relation avec lui», se souvient Dina. Ce garçon était un sacré numéro : il avait fait quelques bêtises et plein de belles choses. Les professeurs ont aussi raconté ce qu’il leur avait donné. Les adolescents ont été touchés par ce regard positif venant de témoins extérieurs. A l’issue de cette rencontre, deux élèves rappeurs ont écrit une chanson et ils ont interprété leur création devant l’ensemble du collège. En redisant bonjour à nouveau à leur ami, les élèves de sa classe ont permis que leur vécu avec Foued se poursuive d’une façon différente.
A lire : Echec scolaire, une autre histoire possible. Le coaching au service des jeunes en difficulté, de Dina Scherrer, Chez « L’harmattan ».

Une approche inventée par un Australien
Cette démarche a été formulée par le thérapeute australien, Michael White, (1949 – 2008) Elle cherche à repérer comment les histoires (familiale, professionnelle, tribale) nous façonnent, en dégageant celles qui nous dominent et limitent notre existence et celles qui correspondent davantage à ce que l’on souhaite vivre vraiment. Cette approche intègre des travaux d’anthropologues, qui ont notamment observé les rites mis en place par les aborigènes, ainsi que l’action de travailleurs sociaux auprès de populations méprisées. Elle s’appuie aussi sur les recherches de sociologues, mais aussi de philosophes français comme Gilles Deleuze, Jacques Derrida, Michel Foucault, Gaston Bachelard, Paul Ricoeur, Pierre Bourdieu.

A lire :
Sur internet l’article de Michael White sur se dire bonjour à nouveau est lisible en français sur le site : http://www.croisements-narratifs.fr/ (rubrique traduction)
En livre
– « Qu’est-ce que l’approche narrative ? », Alice Morgan, Lulu.com. Une présentation claire et accessible, qui montre que cette démarche peut s’appliquer aussi à des séparations avec des personnes qui encore en vie, mais avec lesquelles nous ne sommes plus en relation.
– « Les approches collaboratives en thérapie », de Béatrice Dameron, Satas. Un livre pour comprendre notamment comment les personnes vivant des séparations peuvent être accompagnées en allant chercher leurs élans de vie à travers leur propre histoire.

Publié le : 8 novembre 2014 | 3 commentaires | Partager/Mettre en favoris


Qu’est-ce que l’Approche Narrative ? Publié le : 5 juillet 2014

Les origines

Les Pratiques Narratives ont vu le jour en Australie il y a maintenant presque trente ans. Michael White (1948-2008), thérapeute australien, et David Epston, thérapeute néo-zélandais, en sont les deux chefs de file. Leur introduction en France est très récente. C’est une approche qui vient avant tout de l’accompagnement collectif. Elle a été mise au point par des travailleurs sociaux qui, dans leur travail quotidien, étaient confrontés à des populations en proie à diverses dépendances, à l’inceste, au viol, à la pédophilie, ainsi qu’à des suicides. Ce n’est pas un hasard si cette approche est née en Australie. Ce continent a été l’objet d’une colonisation violente. La population d’origine y a été la victime d’un double génocide. La quasi-totalité des Aborigènes a été éliminée physiquement et, dans ce qui restait des communautés, la pratique systématique a été d’enlever les enfants à leur famille pour les placer chez des colons afin de les « assimiler ». Depuis lors, des problèmes dramatiques se sont développés au sein des communautés aborigènes, notamment l’alcoolisme, la violence, l’inceste. La déscolarisation fait aussi partie des maux de cette société et, comme on peut s’en douter, elle n’arrange rien. Des psychologues et thérapeutes blancs ont été sollicités. Parmi eux, Michael White, qui s’est démarqué par une posture originale. Il a dit aux Aborigènes : « On nous demande de vous aider à résoudre des problèmes que nous avons créés. C’est un peu compliqué pour nous. Nous ne connaissons rien à votre culture, à vos traditions. Donc, tout ce que nous pouvons faire pour vous aider est de vous demander de nous expliquer comment vous pensez le monde, et de rechercher dans votre culture et dans vos traditions, qui ont 50 000 ans, si par hasard il y a des solutions qui ont déjà été élaborées pour résoudre les problèmes de la communauté. » Pour moi, le fondement même des Pratiques Narratives est là, dans cette posture modeste que Michael White adopte face aux Aborigènes. C’est l’autre qui sait, qui est expert de sa vie. C’est l’autre, en nous parlant de ce qu’il vit, en répondant à notre invitation de nous aider à l’aider, qui va s’aider lui-même. Individu ou communauté, chacun possède en lui la ressource de développer les histoires qui le rendront plus fort.

Ce que sont les Pratiques Narratives pour moi

Les Pratiques Narratives, pour moi, sont à la fois une représentation de l’être humain, une éthique de la relation à l’autre et une méthode d’intervention. Une représentation de l’être humain Nous savons tous que les peuples se racontent des histoires qui forgent leur identité. Certaines de ces histoires sont directement constatables : dans les légendes qu’on se répétait ou qu’on chantait jadis, dans les textes qui structurent la vision du monde, ou, à l’époque moderne, dans les manuels utilisés dans les classes par les enseignants. Qu’est-ce qu’être hébreu, chrétien, musul-man, français, russe ou chinois, marxiste, néolibéral ou écologiste, sinon se raccorder à une histoire qui explique le monde et comment s’y comporter ? Que l’identité se tisse d’histoires n’est pas seulement vrai pour un peuple ou une communauté. Comme l’a montré, en France, Boris Cyrulnik, c’est tout aussi vrai pour les individus. Chacun d’entre nous, plus ou moins consciemment, se raconte des histoires et ces histoires ont une conséquence déterminante sur la façon dont il vivra les événements qui affecteront sa vie. Selon la narrative, il convient de parler d’histoires au pluriel. Les individus ou les communautés qui survivent à une épreuve inouïe ont parfois dû changer l’histoire qu’ils se racontaient. Mais une nouvelle histoire ne s’achète pas en magasin, comme un autre disque à mettre sur le lecteur. Une nouvelle histoire n’est vraiment nôtre que si elle se raccorde à notre intimité la plus profonde, que si elle se tisse de ce qui est déjà en nous. La représentation que nous propose donc la Narrative de l’être humain est celle d’un être « multi-histoires ». Il peut interpréter une « histoire dominante », de même qu’on interprète une partition musicale ou un rôle. Mais, en cas de besoin, il est capable, en fouillant dans ses expériences de vie, de constituer ou de faire ressurgir une nouvelle histoire qui sera vraiment sienne tout en lui offrant des choix et des stratégies plus pertinents. Vivre sa vie différemment, en accord avec ses valeurs et principes, est l’aboutissement de la démarche narrative. Une première conséquence de cette aptitude à produire des histoires différentes est que la personne peut être détachée du problème. Dans la représentation de l’être humain à laquelle nous invite la Narrative, il y a ce principe clé selon lequel « le problème est le problème, la personne est la personne, la personne n’est pas le problème ». On touche ici, déjà, à l’éthique dont la Narrative est porteuse. Une représentation, donc, de la personne comme étant « multi-histoires » mais avec, parmi ces histoires, un récit qui prend davantage d’importance que les autres, que nous appelons « l’histoire dominante ». Nous avons tous des histoires dominantes que nous faisons vivre dans les différentes étapes de notre vie. Elles se construisent à partir de ce qui se raconte et de ce qui se dit de nous dans nos milieux d’origine – famille, communauté locale ou professionnelle, école, etc. – et s’enrichissent de ce que nous vivons. Elles s’ancrent en nous au fil des années et finissent par prendre une place de plus en plus grande. Certaines de ces histoires peuvent nous aider à faire face à des situations difficiles. D’autres, inversement, peuvent nous empêcher d’avancer ou nous faire souffrir. Elles deviennent alors des « histoires dominantes à problèmes » et c’est souvent ce qui amène nos clients à venir nous voir. Quand un client vient nous voir, il nous raconte souvent une histoire dominante à problème, par exemple : « Je suis trop timide » ou « Je suis quelqu’un qui ne sait pas prendre de décision. » Il nous raconte son histoire comme si c’était à la fois la réalité et la fatalité. « Je suis comme cela », autrement dit : « Je suis né comme cela, je ne peux pas être autrement. » Pour nous la raconter, il va aller chercher spontanément dans ses expériences de vie tous les exemples qui renforcent sa croyance qu’il est « comme cela ». Tout le travail d’un accompagnement narratif va être d’écouter et d’accueillir cette « plainte » de notre client. J’entends « plainte » comme l’expression par une personne de sa souffrance, de son mal-être ou de son insatisfaction. Mais il ne s’agit pas seulement de l’écouter et de l’accueillir. Il s’agit de considérer cette plainte comme un hommage que cette personne rend à ses valeurs. Car un problème est un problème quand ce qui est important pour la personne est étouffé. Il s’agit donc d’abord de reconnecter celle-ci avec ce qui a de la valeur pour elle dans la vie. Son « histoire de problème » prendra alors pour elle des allures de résistance, sa manière à elle de rester fidèle à ce qui lui est important. Ensuite, il s’agit de faire prendre conscience à notre client que l’histoire qu’il raconte ne prend pas autant de place que cela dans sa vie et qu’il y a encore beaucoup d’espace pour d’autres histoires possibles pour lui. Des histoires d’exceptions à l’histoire jusque-là vécue comme dominante et problématique. L’inviter à aller puiser dans ses autres expériences de vie toutes les fois où le problème ne s’est pas manifesté, toutes les fois où il a eu de l’influence voire le dessus sur le problème. Avec les exceptions va naître au fur et à mesure des séances une nouvelle histoire, que nous appelons une « histoire préférée ». En prenant de l’ampleur, cette histoire préférée viendra contrebalancer l’histoire du problème qui du coup perdra de plus en plus de son pouvoir sur la personne. Une éthique de la relation à l’autre La narrative est une éthique car elle nous invite à avoir un regard positif sur tout être humain et à n’intervenir que dans le respect de sa responsabilité. Elle considère aussi que, si ce que nous appelons « l’individu » existe, il ne saurait en revanche se construire, identitairement, sans la société de ses semblables. Elle s’adresse donc certes à l’individu, mais à l’individu dans une communauté – de vie, de travail, etc. Jamais la personne et le problème ne sont confondus. Le regard du coach narratif est fondé principalement sur deux choses : – la foi inconditionnelle dans les potentialités de l’autre, quel que soit le visage qu’il nous présente ou l’histoire par laquelle il s’est fait – comme nous disons – « recruter »; – la foi dans sa capacité de liberté et de respon-sabilité par rapport aux histoires qui l’asservissent. Chacun d’entre nous est considéré comme ayant une aptitude inaliénable à orienter le cours de sa vie. Chaque être humain est à lui-même son propre espoir. Il ne s’agit donc pas, pour le coach narratif, d’être une sorte de directeur de conscience, d’enseigner les bons comportements ou d’orienter les choix de la personne, mais d’inviter la personne qui est en face de lui à visiter des ressources qu’elle a déjà à son insu pour produire de nouvelles solutions. Ce regard sur l’autre, prêt à accueillir, peut être facilité par des dispositions personnelles du coach, mais il n’est en aucun cas acquis et reste en permanence à cultiver et à entretenir. C’est l’effort éthique, parfois l’ascèse, propre au coaching narratif. Une méthode d’intervention La particularité de la méthode narrative est d’être un questionnement sur les récits. Par son questionnement, le coach fait émerger les récits qui structurent l’identité et les comportements de la personne. C’est une méthode d’intervention basée sur des conversations narratives. Derrière chaque question du coach narratif il y a une intention, celle d’aller chercher un certain type d’information. Il y a les conversations narratives « externalisantes » : elles s’appuient sur des questions qui ont pour intention de faire émerger l’histoire dominante et de détacher la personne du problème. Il y a les conversations de « re-autoring », avec des questions dont l’intention est d’aller chercher dans la vie des personnes tout ce qui est important pour elles : rêves, espoirs, croyances, engagements, afin de les aider à augmenter leur sentiment d’initiative et d’influence personnelles et, au final, afin de les rendre à nouveau auteur de leur vie. Qu’est-ce qu’il veut ? Quelle est son intention ? Les gens agissent toujours dans un objectif. Leur permettre de développer le plus d’histoires possible à partir de leurs intentions. La reine des questions étant : Qu’est-ce qui est vraiment important pour toi ?

Dina Scherrer

Publié le : 5 juillet 2014 | 2 commentaires | Partager/Mettre en favoris


Un nouvel espace de supervision Publié le : 1 novembre 2013

photo de Nathan Einhorn

Dina Scherrer & Stéphane Einhorn réunissent leurs pratiques et expériences de l’accompagnement pour vous proposer un groupe de supervision en co-animation.
Deux regards différents et complémentaires qui intègrent Pratiques Narratives, Systémique et co-développement afin de vous permettre d’avancer dans vos pratiques en mode collaboratif et participatif.

http://www.dinascherrer.com

http://blog.coach-et-moi.com

Modalités pratiques :
Un groupe ouvert de 6 personnes maximum
Un tarif de 120 € TTC par séance

Les séances se dérouleront à Paris 16 de 14h 00 à 18h 00 aux dates suivantes :
Mardi 28 janvier
Jeudi 06 mars
Mercredi 30 avril
Jeudi 05 juin

Pour vous inscrire ou vous renseigner :
scherrer.dina@yahoo.fr
s.einhorn@coach-et-moi.fr

Publié le : 1 novembre 2013 | Aucun Commentaire | Partager/Mettre en favoris


Vers une pédagogie émotionnelle… par Cédric Serres Publié le : 14 juin 2013

Cédric Serres est instituteur dans l’Hérault, il est membre du groupe départemental de l’Hérault (ICEM 34). Il m’a invité à participer au dernier colloque des pratiques collaboratives de l’ICEM 34 en mars dernier. Ce qu’il arrive à mettre en place au sein de sa classe redonne espoir dans l’enseignement et surtout fait en sorte que le jeune se réapproprie l’école comme un lieu de partage, d’échange. Il n’y a pas que le maître qui sait, lui aussi peut apporter sa contribution. C’est juste formidable.

Ci-dessous le témoignage de Cédric sur son expérience au quotidien dans sa classe, notamment l’expression qui permet aux émotions de trouver leur place dans une classe bienveillante :

Lundi, Conseil de classe, 11h du matin :
Président du conseil : “ Le conseil est ouvert, qu’est ce que vous aimez le plus dans la classe ?”
Un tour de table où chaque élève, s’il le souhaite peut prendre la parole pour dire ce qu’il aime le plus : l’anglais, les mathématiques, PIDAPI, le quoi de neuf, les ventilateurs, la classe mobile, la sortie, le futsal, le maitre, moi etc.

Vendredi soir, bilan de la semaine, 16h35 :
Président du jour : “C’est l’heure du baromètre des émotions de la semaine. Qui a ressenti de la peur? de la honte ? du dégoût ? de la colère ? de la tristesse ? de l’amour ? de la joie ?”Chaque élève qui le souhaite lève la main pour se signaler pour chaque émotion. On remarque tout de suite que nous ressentons tous ou presque, toute la palette des émotions dans la classe tout au long de la semaine.
Président du jour : “Qui veut parler pour l’amour ?” Myriam : “J’ai ressenti de l’amour quand on a travaillé la danse dans la salle APEX pendant la récré avec les copines, parce qu’on était toutes ensemble.”Ainsi la classe est-elle rythmée par l’expression de l’amour. Mais au-delà de ces moments formels, institués dans la classe et d’autres encore tout au long de la journée, l’amour est présent dans la classe par la posture que je choisis d’adopter. Fort de ma conviction que tout le monde est éducable, j’accueille chaque élève dans son originalité et sa singularité. Unseul guide, l’amour inconditionnel.

Définitions :
L’amour inconditionnel : Partage d’un sentiment d’affection sans condition et en toutes circonstances.
Mises en œuvres dans la classe:
Attitudes du maitre :
Je bannis tout jugement. C’est d’ailleurs une règle de vie incontournable de notre classe : “je ne me moque pas, je suis bienveillant”. C’est un postulat qui m’incite à toujours faire confiance à l’enfant, à toujours lui permettre de s’exprimer et finalement à lui laisser le droit à l’erreur. Même le maitre a droit à l’erreur. Et je ne la maquille pas avec des expressions du style : “c’était pour voir si vous suiviez.” Au contraire, montrer que je suis faillible incite les enfants à utiliser leurs outils plutôt que le maitre comme support. L’écoute des émotions. Les émotions sont au cœur de notre classe, comme elles sont au cœur de notre être. Pour vivre l’instant présent la seule possibilité est d’être pleinement dans la conscience de soi et donc dans la découverte de soi, l’apprentissage. Ce sont nos émotions qui nous permettent cette prise de conscience : qu’est ce que je ressens face à ce qui m’arrive ? Qui je suis ? Ainsi, les enfants travaillent pour eux-mêmes (motivation intrinsèque). Ils ne sont pas dans la projection du cadeau qu’ils auront s’ils ont une bonne note, ou encore de la baffe qu’ils recevront s’ils en ont une mauvaise. Bienentendu, cette recherche de motivation intrinsèque est un chemin, elle ne se décrète pas. Des outils de motivations extrinsèques doivent être mis enplace pour progresser sur ce chemin.
Des outils : (je n’en ferai qu’un bref aperçu sans être exhaustif)
Le quoi de neuf :
Un outil essentiel pour prendre sa place dans la classe. La consigne que je donne en début d’année est : “qu’est ce que j’ai vécu hier ou ce WE, et qu’est ce que j’ai ressenti ?” Ainsi les enfants commencent-ils par décrire une situation, qu’ils ferment en indiquant “et j’ai ressenti de la peur de voir la dame Blanche sortir de
l’ordinateur”. C’est aussi un outil d’analyse pour moi. Qui prend la parole ? Qui ne la prend pas ? Force de la voix, comportement dans l’expression orale (mimique, bégaiement, mouvement …) des indications qui me permettent inconsciemment au départ puis de plus en plus consciemment de mieux connaître mes élèves.
Les temps de critiques :
Après de nombreuses présentations faites par des élèves, par exemples les lectures offertes ou encore les exposés voire même les textes libres, il y a toujours un temps plus ou moins long (on interroge plus ou moins de personnes, environ 4 ou 5) de retours du groupe. Ici il est impératif de commencer par une remarque positive. Et le “je trouve que tu as bien lu” n’est pas suffisant. J’entraine régulièrement les enfants à définir ce qu’ils trouvent bien : le ton, le rythme, les mots difficiles, le choix du thème.
Ensuite viennent les critiques constructives sous forme de message je : “j’aurais aimé qu’il y ait plus d’images, j’aurais aimé que tu prépares plus ta lecture…” Certains enfants, ou à la demande du président de séance, font même une demande : “ et ma demande c’est que tu choisisses des images et que tu les imprimes pour les rajouter sur ton exposé.”
La phrase du jour :
Chaque jour, il y a un rituel phrase du jour. Cette année j’ai choisi de laisser l’écriture libre de la phrase du jour le mardi, le lundi c’est une dictée du jour, le jeudi et le vendredi c’est une écriture sous contrainte (écrire une phrase avec “mais”, écrire une phrase avec un CCL…). Néanmoins, lorsque l’enfant écrit sa phrase du jour au tableau, les autres élèves doivent rechercher en priorité tout ce qui est bien dans sa phrase. Je remarque que l’enfant qui est au tableau se redresse au fur à mesure
des remarques. Quand vient l’heure de corriger certaines erreurs, il est tellement regonflé qu’il en est encore plus attentif.

Le baromètre des émotions :
C’est un simple affichage, un moment de classe qui clôt notre semaine. Toutes les émotions sont évidemment vécues, mais ici on reparle d’un moment qui a été fort pour nous. Nous n’avons pas tous été marqués par les mêmes évènements, le partager aux autres nous ouvre les portes de l’empathie, cela resserre encore les liens du groupe.
Le tour d’aide :
C’est un moment de vie qui clôt notre journée. Tous les soirs nous faisons un bilan de la journée après avoir rangé la classe. C’est le moment de donner une “aide” à un camarade. C’est un peu comme une félicitation, avec en plus le fait que ça contrebalance une gêne de la journée. La règle étant de ne donner qu’à une seule personne, il faut choisir. C’est le choix qui provoque ici la connaissance de soi. Il est aussi demandé que l’aide soit justifiée : “Je donne une aide à Fatima parce qu’elle m’a aidée sur la ceinture d’orthographe.”
L’écoute :
Quand je me rends compte qu’un enfant n’est pas bien, je l’écoute. Je prends le temps pour lui. Comme souvent il ne se livre pas, je vais à la pêche aux informations, en lui parlant de mon ressenti. Un enfant se bat dans la classe, son visage est fermé, il est plein de colère et surtout de violence. Je n’ai que l’écoute pour l’aider. Ce qui importe, c’est qu’il se sente compris, important, autorisé, tout en évitant un passage à l’acte, c’est ce que j’appelle la sécurité affective. Il n’est pas question de réprimer ses émotions. En revanche, il est utile de vérifier que l’enfant ne s’enferme pas dans un sentiment.L’émotion ne dure que quelques minutes. Il arrive qu’un enfant pleure
dans la classe : «Je suis triste parce que mon papa part au Maroc et je ne vais pas le voir pendant 15 jours.» Et voilà le grand gaillard qui s’effondre en larmes, il est 9h30. Pour couper court aux «il pleure» des autres élèves (même empathique), je l’invite, je le rassure: «tu as le droit de pleurer, c’est normal dans cette situation». L’émotion est vite passée. Le sentiment est beaucoup plus long dans le temps, il s’installe et parfois l’on caractérise la personne par ce qu’elle vit. «Elle est toujours fatiguée»,
«je me sens déprimée». Lui coller une étiquette renforce alorsson sentiment, et l’enfonce encore plus.

Nous avons eu la chance de rencontrer Dina Scherrer lors de notre deuxième colloque des pratiques coopératives de l’ICEM34. Son approche des élèves avec ses conversations externalisantes est un véritable outil pour démonter les catégorisations.

La condition pour être, c’est d’écouter qui je suis. D’accepter mes imperfections et mes lacunes, mais aussi mes qualités et mes connaissances. Un mélange complexe de confiance en soi et de connaissance de soi. De l’humilité et de l’orgueil. Et si c’était ça, l’amour ?
Et en même temps, on voit bien que dans la classe il y a une dimension supplémentaire : les autres. C’est ce que Thich Nhat Hanh caractérise par «l’inter-être». Je ne suis pas Bouddhiste, cependant c’est la plus belle fleur que j’ai trouvée poussant sur le terreau de l’amour : Vous ne pouvez pas « être » simplement par vous- même.
Vous devez forcément inter-être avec toutes les autres choses.

Et pour conclure voici le mot d’Eliane, une amie institutrice à la retraite quia découvert la pédagogie coopérative via l’OCCE de son département. Je lui ai parlé de ce thème pour le nouvel éducateur car elle a écrit un livre qui parle exactement de cela.

« Pour moi, c’est, avant tout, un ressenti envers les futures générations. Aimer, c’est voir très loin, c’est avoir envie de développer l’humanité de l’Homme, pour qu’il soit plus heureux dans ses rapports avec les autres avec lui-même. Je crois, fermement, qu’il construira, dans l’avenir lointain,un monde meilleur. Aimer, c’est regarder les enfants dans toutes leurs dimensions, sans discrimination. C’est aider au lieu de juger, c’est accepter au lieu de condamner. C’est regarder chacun avec un œil neuf, l’œil de l’Amour universel, en essayant de développer ses potentiels, de faire en sorte qu’il puisse exploiter ses propres richesses. Pour cela, il est indispensable de luidonner un minimum de liberté de s’exprimer, de travailler à son rythme. Aimer, c’est semer des graines pleines de soleil dans le cœur des enfants.Les pensées sont des forces qui se propagent à la vitesse de la lumière. Nous sommes, nous, enseignants, des porteurs de cette lumière qui se diffuse dans le cœur de nos élèves. Ces petites gouttes feront un grand océan dans quelques centaines ou milliers d’années !!Aimer, ce n’est pas seulement des MOTS que l’on dit. C’est vivre chaque jour dans cette harmonie, c’est faire vivre nos élèves à travers des ACTES d’amour.
Aimer c’est partager, les joies, les peines. C’est encourager, toujours et toujours. C’est être là, disponible.
Amicalement »

Eliane
« L’École, Ma Passion, Ma Mission »

http://www.eliane-scordo.fr/

Publié le : 14 juin 2013 | 1 Commentaire | Partager/Mettre en favoris